La consommation des ressources, énergétiques et non énergétiques, et la production de déchets, font partie des enjeux majeurs du développement durable. La construction pèse lourdement sur les bilans européens en la matière.
La rénovation d’une école peut répondre à ces enjeux.
Si la réduction des consommations énergétique est un objectif maintenant bien intégré, la question des matériaux et des déchets reste moins connue. Cette question nécessite de reconsidérer notre fonctionnement global pour que, comme dans la nature, les déchets d’une activité, d’un usager, constituent les ressources pour un autre usage.
Certaines théories ont construit une réflexion sur ce sujet, comme l’écologie industrielle, ou le concept de « cradle to cradle ». Elles ne sont pas spécifiquement appliquées au secteur de la construction, mais proposent une réflexion sur les flux de matières et d’énergie qui vise à fermer des boucles, à créer des cycles qui permettraient de valoriser les ressources à l’infini et d’éliminer la notion de déchet.
La théorie « cradle to cradle » a évolué vers une labellisation, qui a été appliquée à certains matériaux de construction et garantit une démarche intégrant une réflexion globale sur les flux de matières et d’énergie.
Cradle to cradle: parallèle entre le cycle des matériaux et des produits, et celui des organismes naturels.La théorie développée à la VUB sous l’appellation « design for change » s’est construite autour de la question de l’architecture et du bâtiment :
23 critères ont été définis par l’OVAM et la VUB pour permettre d’améliorer le potentiel d’évolution.
Les critères s’appliquent aux échelles :
- élément de construction
- bâtiment
- quartier
et aux niveaux :
- des interfaces entre les sous-composants, leurs connexions
- des sous-composants
- de la composition, l’agencement des sous-composants les uns par rapport aux autres.
Interfaces |
Sous-composants |
Composition |
|
Eléments |
|||
Bâtiment |
|||
Quartier |
Les critères et leurs explications qui sont présentés ci-après sont une traduction du travail de la VUB –TRANSFORM diffusé par l’OVAM sur le site :
http://www.ovam.be >>> 23-ontwerprichtlijnen-toelichting-en-downloads.
Tout le crédit de ce travail revient à l’équipe de la VUB –TRANSFORM : http://www.vub.ac.be/ARCH/ae-lab/about/transform
Réversibilité (à l’échelle des éléments)
- Est-ce que les assemblages utilisés sont réversibles ?
Pourquoi ?
La réversibilité des assemblages entre les différents composants détermine la possibilité de les démonter sans les endommager. Ce critère est déterminant pour le potentiel de réutilisation et permet d’améliorer l’efficacité des processus de tri et de recyclage.
Comment ?
L’utilisation de fixations réversibles comme des vis ou des boulons est privilégiée par rapport à des assemblages de type mortier ou colle, ou encore les clous. Les assemblages réversibles ne sont en général pas continus, ce qui nécessite quelques adaptations pour atteindre les performances d’étanchéité à l’air et à la vapeur.
Source : Openstructures.
Simplicité
- Les assemblages complexes sont-ils évités ?
- Les méthodes d’assemblages utilisées sont-elles standard ?
- Les tolérances d’assemblages ont-elle été anticipées ?
Pourquoi ?
Les assemblages complexes qui nécessitent l’expertise de spécialistes rendent le démontage moins facile, et plus coûteux. Réduire la complexité améliore donc l’évolutivité des solutions appliquées
Comment ?
L’utilisation de fixations simples et standardisées permet de rendre le démontage efficace. La lisibilité de la technique de construction et d’assemblage est également essentielle pour tout démontage ou toute modification.
Rapidité
- Le nombre de connexions est-il limité ?
- Les connexions sont-elles accessibles ?
Pourquoi ?
La rapidité avec laquelle les éléments de construction peuvent être assemblés et désassemblés influence énormément la probabilité qu’ils soient démontés et réutilisés au cours de la vie du bâtiment ou à la fin de la vie de celui-ci.
Comment ?
Les connexions accessibles visuellement, physiquement et ergonomiquement facilitent le montage et le démontage. Le nombre de connexions influence aussi la rapidité du montage et du démontage. L’utilisation d’un seul système de fixation pour les différentes connexions dans un bâtiment permet de faciliter le montage et le démontage.
Durabilité (dans le temps)
- Les matériaux des composants sont-ils résistants (montage – démontage – transport) ?
- Les composants ont-ils une longue durée de vie ?
Pourquoi ?
Une réutilisation n’est envisageable qu’à condition que le matériau y résiste, physiquement. Le transport, le démontage et le remontage ne doivent pas affecter ses caractéristiques. Les fonctions mécaniques doivent être maintenues dans le temps, ainsi que d’autres, telles que l’aspect esthétique.
Comment ?
Les exemples de matériaux qui restent réutilisables après différents processus de montage, démontage et transport sont surtout des maçonneries, des carreaux et tuiles en terre cuite, des poutres et des profilés en acier, des planches et des poutres en bois. La préférence est donnée à des composants nécessitant peu de maintenance.
Tableau des durées de vie technique attendue pour différents matériaux de construction :
Réutilisation de matériaux existants
- Des matériaux existants sont-ils réutilisés ?
Pourquoi ?
Dans la pratique courante, de nombreux matériaux de construction ne sont pas maintenus en place pendant toute leur durée de vie technique dans le même bâtiment. La réutilisation de matériaux permet d’éviter la production de matériaux neufs et de réduire la quantité de déchets de construction produits.
Comment ?
L’utilisation de matériaux de seconde main, provenant ou non du secteur de la construction, pour un usage identique ou pour un autre usage se développe via des filières spécialisées.
Compatibilité
- Les composants sont-ils standardisés et interchangeables ?
- Y a-t-il un marché pour le réemploi des composants ?
Pourquoi ?
Par l’utilisation de composants standardisés et compatibles, dont les tailles et formes sont harmonisées, on augmente les possibilités en termes de réemploi. Pendant la durée de vie du matériau dans un même bâtiment, un élément peut être remplacé par un autre, l’ensemble peut évoluer partiellement via d’autres éléments compatibles. En termes de réemplois, les différents composants peuvent être éventuellement réparés, et réutilisés, dans la même configuration ou dans une autre configuration.
Comment ?
L’utilisation de grilles fractales permet de définir des composants compatibles peut être utilisée. Plus communément, l’utilisation de dimensions standardisées, pour les portes, les sanitaires, pour les éléments de cuisine par exemple, va dans ce sens.
Conception par couche, suivant la durée de vie
- Les éléments de durée de vie technique ou fonctionnelle différente sont-ils physiquement indépendants ?
Pourquoi ?
La séparation physique des éléments qui n’ont pas la même durée de vie permet de les remplacer tout en maintenant les autres éléments en place.
Comment ?
Les différentes couches sont séparées suivant leur durée de vie. Certains composants seront remplacés à cause de nouvelles exigences techniques, d’autres pour raisons esthétiques, d’autre encore à cause de la dégradation de leurs performances.
Couches indépendantes : les couches qui ont des durées de vies technique ou fonctionnelle différentes peuvent être séparées facilement.
Couches dépendantes : les couches qui ont des durées de vies technique ou fonctionnelle différentes ne peuvent pas être séparées facilement.
Exemples de différentes solutions pour la séparation des couches dans un plancher.
Fonctions dans un système de plancher :
c – construction, structure
f – finition
s – service, techniques
i – isolation
Indépendance
- Les éléments sont-ils assemblés de manière indépendante ?
Pourquoi ?
Ce critère est lié aux relations entre les éléments de construction. Peut-on démonter un élément pour le remplacer, le réparer ou avoir accès aux éléments sous-jacents, sans en démonter d’autres ? L’indépendance des éléments facilitée également le démontage total.
Comment ?
Le démantèlement doit pouvoir être réalisé parallèlement et non de manière séquentielle.
Préfabrication
- Les composants sont-ils préfabriqués en usine ?
Pourquoi ?
La préfabrication offre des avantages évidents en termes de contrôle de la qualité, de réduction des déchets, de diminution du temps de chantier, etc. En outre, la préfabrication permet le montage et l e démontage facile et rapide d’ensembles de composants.
Comment ?
La préfabrication peut être réalisée au niveau d’une couche fonctionnelle, comme la structure, ou le parement de façade, ou au niveau d’une paroi complète comme les parois de façade, avec isolation et menuiseries intégrées.
Source : Ovam.
Réversibilité (à l’échelle du bâtiment)
- Les liaisons entre les éléments permettent-elle les modifications, ajouts, ajustements, réparations
Pourquoi ?
Pour éviter les dégradations des éléments connexes, les éléments qui ont un haut taux de renouvellement / modification doivent pouvoir être démontés séparément.
Comment ?
Par le choix de techniques d’assemblage réversibles pour la connexion des éléments de construction, pour rendre le démontage des éléments et des composants qui leur sont associés possible. C’est l’équivalent de la réversibilité des assemblages, à l’échelle du bâtiment.
Démontabilité des éléments porteurs ou non porteurs
- Les éléments non porteurs sont-ils sélectivement démontables ?
- Les éléments porteurs sont-ils sélectivement démontables ?
Pourquoi ?
Pour permettre leur démontage, réemploi, réparation, les éléments du bâtiment doivent être démontables séparément sans provoquer de dégâts.
Comment ?
Durant la phase de projet, une attention particulière doit être portée à la démontabilité des éléments de construction et à la réversibilité des assemblages pour permettre la maintenance et des modifications tout au long du cycle de vie du bâtiment. Une distinction doit être faite entre les cloisonnements non porteurs, qui peuvent être modifiés facilement, et les éléments porteurs ou techniques, qui nécessitent l’intervention de professionnels pour être modifiés en toute sécurité.
Potentiel de réutilisation :
- Les éléments sont-ils réutilisables dans le même projet ?
- Les éléments sont-ils réutilisables dans un autre projet ?
Pourquoi ?
Les avantages de la réutilisation de parties de bâtiment sont évidents, pour des questions écologiques et économiques. La réutilisation sur place évite aussi le transport.
Comment ?
Les dimensions et les formes des éléments de base influencent fortement leur potentiel de réutilisation. Si les éléments ont été développés et produits uniquement pour un projet, il est peu probable qu’il puisse être réutilisé dans un autre projet. On parle de système de construction « fermé ». Par contre si les composants sont conçus et produits indépendamment du projet, avec la possibilité d’être combinés de différentes manières, ils pourront être utilisés dans le projet puis démontés et répondre aux besoins d’un autre projet. On parle alors de système de construction « ouvert ».
Système de construction « fermé » et système de construction « ouvert ».
Potentiel d’extension des éléments :
- Les éléments techniques sont-ils surdimensionnés ? (structure porteuse, couches techniques, couches d’isolation)
- Les éléments de structure peuvent-ils être facilement renforcés
- Les gaines techniques sont-elles positionnées et dimensionnées stratégiquement ?
- Est-il possible d’ajouter de l’isolation ?
Pourquoi ?
Les modifications d’un bâtiment, tant en termes de volume qu’en termes de fonctions, nécessitent des modifications techniques relatives à la structure, aux installations, aux techniques, et à l’isolation thermique et acoustique. Ces possibilités doivent être prises en compte lors de la conception du projet
Comment ?
Il existe deux manières de tenir compte d’extensions futures :
Prévoir de la marge en anticipant les modifications futures
Réaliser les modifications au moment où elles seront nécessaires, s’assurer que celles-ci soient possibles.
Au niveau structurel, la première manière nécessite une vision claire des évolutions futures et implique souvent une utilisation de plus de matériaux, mais la seconde nécessite souvent des interventions complexes et chères. Au niveau technique (chauffage, alimentations et évacuations d’eau, électricité, communications, …), les évolutions sont tellement rapides qu’il est inévitable de prévoir l’espace, l’accessibilité et les regroupements qui permettent d’intervenir facilement.
Potentiel de changement de la distribution des fonctions :
- L’organisation du bâtiment est-elle polyvalente ?
- Les éléments de constructions sont-ils mobiles ?
- L’organisation du bâtiment est-elle transformable ?
Pourquoi ?
Un bâtiment dans lequel il est possible de modifier l’organisation aura une durée de vie plus longue sans rénovation profonde. La flexibilité dans les utilisations possibles du bâtiment permet de réduire les besoins d’intervention lourde, et tous les impacts environnementaux et économiques qui y sont liés.
Comment ?
Il existe trois manières de permettre le changement dans la distribution des fonctions :
- Une organisation polyvalente du bâtiment. Des espaces multifonctions définis grâce un plan et une structure bien organisés et conçus, qui n’impliquent pas de modifications techniques substantielles
- éléments et dispositifs mobiles tels que des cloisons accordéon, amovibles, pivotantes ou coulissantes.
- Une organisation du bâtiment transformable par le démontage facile d’éléments structurels ou non.
Clarté, évidence (à l’échelle du quartier)
- Les connexions entre les bâtiments et les infrastructures sont-elles évidentes ?
Pourquoi ?
L’application de liaisons évidentes entre le bâtiment et les éléments du quartier, ainsi que leur accessibilité, permet d’assurer une maintenance et des modifications faciles.
Comment ?
Éviter les nœuds complexes et les croisements de conduites, de réseaux techniques et d’infrastructures routières. Des liaisons simples et accessibles permettent leur modification sans endommager, ni les éléments concernés, ni ceux qui ne le sont pas.
Raccordement évident et accessible avec l’infrastructure du quartier.
Raccordement complexe et difficilement accessible avec l’infrastructure du quartier
Possibilités d’évolution (au niveau du quartier)
- Les liaisons entre les éléments du quartier sont-elles modifiables ?
Pourquoi ?
Des liaisons qui permettent facilement l’évolution facile mènent à des modifications dans le temps, pour répondre à de nouvelles envies, de nouveaux besoins. Au contraire de liaisons plus statiques
Comment ?
Matérialiser les séparations entre les parcelles d’un quartier, ou entre les zones publiques, semi-publiques ou privées peut se faire par des moyens non définitifs, ce qui permet une évolution dans le temps de la définition des lieux, des passages, …
Réutilisation
- Des bâtiments ou des infrastructures existantes sont-ils réutilisés ?
Pourquoi ?
Réutiliser des bâtiments est de l’infrastructure existante permet de réduire les impacts environnementaux d’un aménagement, tant au niveau de la réduction des déchets de démolition qu’au niveau des matériaux de construction qui ne devront pas être utilisés. La réutilisation permet aussi de préserver le caractère et l’histoire d’un lieu.
Comment ?
En tenant compte du contexte et en valorisant les bâtiments et les infrastructures existantes.
Dimensionnement
- Le nombre d’infrastructures statiques est-il limité?
Pourquoi ?
Limiter les infrastructures statiques comme les routes, espaces utilitaires et publics, permet de réduire les travaux qui impliquent des modifications des besoins et contraintes.
Comment ?
Éviter le surdimensionnement des surfaces dures et appliquer des différentiations en fonction des usagers (accès différents pour les véhicules motorisés, les piétons, cyclistes, …)
Démontabilité (à l’échelle du quartier)
- La modification sélective de certaines infrastructures et bâtiments est-ellepossible sans créer d’autres dommages ?
Pourquoi ?
Le démontage sélectif de bâtiments et d’infrastructures comme des routes, des places, des zones utilitaires, permet une maintenance plus facile, moins de démolitions et des possibilités de réemplois ultérieurs.
Comment ?
Mettre en œuvre des composants avec des connexions simples et accessibles qui pourront être démontés sans dommage pour réemploi, réparation ou modification.
Les dalles et pavés de pierre ou de béton sont démontables et réutilisables.
velH2O.net est un canal en béton préfabriqué pour la collecte des eaux de pluie. Il est couvert de plaques de béton qui peuvent être utilisées comme piste cyclable et accueille tous les réseaux techniques, qui restent accessibles sans travaux de fouilles.
Structures spatiales (à l’échelle du quartier)
- La fragmentation de l’espace est-elle évitée?
Pourquoi ?
La structure spatiale a un impact important sur les possibilités d’adaptations d’un quartier. Éviter la fragmentation de l’espace permet d’éviter les utilisations d’espace peu efficaces et qui peuvent créer des freins pour des adaptations futures.
Comment ?
Limiter la fragmentation de l’espace disponible en concevant des bâtiments compacts et en regroupant les fonctions publiques.
Structure spatiale fragmentée.
Structures spatiales compactes.
Polyvalence des espaces (à l’échelle du quartier)
- Les équipements publics sont-ils multifonctions et adaptés à différentes formes d’activités ?
Pourquoi ?
Des installations publiques polyvalentes comme des espaces extérieurs, parkings ou hall sportifs, peuvent facilement être occupées, temporairement ou semi temporairement, pour répondre aux besoins de la vie sociale du quartier.
Comment ?
Des espaces polyvalents ne sont pas définis pour une seule fonction, mais peuvent accueillir différentes activités sans que l’espace doive être modifié.
Espaces extérieurs polyvalents.
Diversité (à l’échelle du quartier)
- Y a-t-il une diversité de fonctions, d’équipements et de types de logements ?
Pourquoi ?
La diversité de fonctions, d’équipements et de types de logements augmente l’animation d’un quartier et y améliore la qualité de vie et la cohésion sociale. La diversité rend un quartier plus résistant aux changements de mode de vie. L’intégration de nouvelles fonctions y est plus facile, comme les changements de types de logements pour s’adapter à des situations familiales variables.
Comment ?
Éviter la mono fonctionnalité, et introduire de la diversité au sein des fonctions (différents types de logements, de commerces, de bureaux, …)
Possibilités d’intégration de modifications fonctionnelles
- Y a-t-il des possibilités de densification et d’implantation de nouvelles fonctions ?
Pourquoi ?
L’organisation du quartier détermine la manière dont il peut s’adapter à des modifications à long terme des besoins et des envies. Ceci est généralement lié à l’augmentation de la densité (des bâtiments et des fonctions) pour l’implantation de nouvelles fonctions.
Comment ?
Les éléments déterminants sont :
- Les routes et modes d’accès sont suffisamment polyvalents pour pouvoir s’adapter à des modifications de la mobilité.
- Assez d’espace libre est prévu pour des nouveaux bâtiments et équipements publics ?
- À côté de l’expansion des zones du quartier, la rehausse des bâtiments est également une stratégie possible pour la densification.
- Une attention poussée est-elle accordée au contexte et plus particulièrement aux modifications urbaines (possibilité d’extension et d’intégration des différents réseaux).